La Dépêche du Midi 30 mars 2013
Rythmes
scolaires : «Bonne idée, mais mauvaise application»
Publié le 30/03/2013 à
07:54
expert : Edwige Antier,
médecin-psychiatre, ancienne députée de Paris et auteur de "Vice
l'Education" aux éditions Robert Laffont
La réforme sur les
rythmes scolaires va-t-elle favoriser l'apprentissage de l'enfant en primaire ?
C'est une très bonne
idée, mais son application perd son tout sens. Car le problème de cette
réforme, c'est le temps que passe l'enfant à étudier - à enregistrer de
nombreuses informations compliquées - et le temps qu'il passe en récréation.
Peu importe le nombre de journées passées à l'école pendant la semaine. Avec la
semaine à quatre jours et demi, on n'appréhende pas l'ensemble de la
problématique qui est que c'est surtout la vie en collectivité qui épuise les
enfants. Ce ne sont pas, à mes yeux, le temps passé à étudier en classe qui est
le plus éprouvant. On devrait prendre exemple sur le modèle anglo-saxon où
l'enfant a cours de 9 heures à 15 heures, tous les jours, et passe à des
activités sportives et artistiques l'après-midi. Mais avec de véritables
structures dédiées à cela, un vrai encadrement, des animateurs professionnels
et un projet éducatif à la clé. Et un temps réduit pour déjeuner.
Selon vous, même en
réduisant le temps scolaire, l'enfant est toujours fatigué en sortant de
l'école ?
Oui. Dans le nouveau
projet du ministre de l'Éducation nationale, on conserve une pause d'une heure
et demi tous les jours. Lorsqu'il a fini de déjeuner, l'enfant se retrouve à
jouer pendant plus d'une heure parfois, c'est ce qui le fatigue le plus dans la
journée. Sans compter que certains - des tout-petits parfois - restent
également tard le soir à l'étude en attendant leurs parents. Je vois très
souvent des enfants dans mon cabinet qui se disent épuisés et qui souffrent de
harcèlement en récréation. La cantine, c'est pareil, c'est le bruit et la
fureur dans certaines écoles. Comment voulez-vous que l'enfant soit reposé,
après une heure et demie à déjeuner, pour enchaîner sur des matières importantes
l'après-midi. Plus largement, il s'agit d'un problème de société : comment
réorganiser la vie des familles avec les rythmes scolaires ? Pourquoi les
parents finissent si tard dans nos sociétés d'aujourd'hui ? C'est du temps où
ils n'ont plus prise sur leur enfant. Que ce soit au primaire, d'ailleurs,
comme dans le secondaire (collège et lycée).
Dans l'idéal, que
faudrait-il faire pour permettre à l'enfant de mieux acquérir les connaissances
?
Dans l'idéal, il
faudrait réduire la durée du déjeuner et terminer les cours à 15 heures, comme
ça se fait dans de nombreux pays européens. Avec des récréations plus courtes.
L'après-midi, basculer sur des activités périscolaires bien encadrées, avec des
moyens et en petits groupes. Au départ, cette idée de rythmes scolaires est un
concept intellectuel intéressant. Sauf que sur le périscolaire, le gouvernement
s'est désengagé pour laisser le «bébé» aux collectivités.
Recueilli par Gérald Camier
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